Paru aux éditions Présence Africaine dans la section Poésie et récemment traduit en français, dans ‘’Ode humaniste pour Chibok, pour Leah’’, l’écrivain nigérian Wole Soyinka, Prix Nobel de littérature, interroge les dérives extrémistes du monde contemporain en général et en particulier les travers nigérians avec le Boko Haram.
L’humanité, le constat est là, fait face à une montée de l’extrémisme. Jadis localisé dans le Moyen-Orient, en Asie essentiellement, le terrorisme avec son lot de destruction massive des humains, s’est progressivement installé en Afrique. Notamment en Libye, au Cameroun, dans le désert malien, au Burkina. Et surtout au Nigeria à travers le groupe islamiste Boko Haram. Et qui ne se souvient pas de l’enlèvement de 276 lycéennes de cette localité de l’Etat de Borno au Nigeria dans la nuit du 14 au 15 avril 2014 par le groupe islamiste Boko Haram ? L’histoire de cet enlèvement qui a secoué le monde entier pendant plus de 2 ans, a retenu l’attention du célèbre écrivain, dramaturge et poète, Prix Nobel de littérature en 1986, Wole Soyinka qui publie ‘’Ode humaniste pour Chibok, pour Leah’’. « L’humanité reste une affaire inaboutie », assène d’entrée le grand écrivain Wole Soyinka dans ce long poème écrit en 2019, pour ensuite interroger les dérives extrémistes du monde contemporain, en commençant par les exactions terroristes perpétrées dans son propre pays, le Nigeria par le groupe islamiste Boko Haram.
C’est à lui, symboliquement, que le poète s’adresse, ainsi qu’à la jeunesse nigériane bafouée par l’obscurantisme meurtrier des djihadistes. S’il fustige très durement ces derniers, il pointe aussi du doigt tous ceux qu’il juge responsables des problèmes qui, au fil des temps et bien avant la formation de Boko Haram en 2002, ont commencé à miner le tissu social nigérian : « Ni le jour dernier ni l’an passé, ni les décennies ni les siècles n’ont été subitement absous de culpabilité. » Wole Soyinka n’épargne personne. Il s’en prend aux néo-religieux de toutes obédiences, ces prêcheurs starifiés par leurs ouailles pour leur aisance matérielle, preuve incontestable qu’ils sont élus de Dieu.
En réalité, les interrogations du célèbre écrivain vont au-delà des frontières du Nigeria. Lui, qui évoque d’autres théâtres d’attaques terroristes dans le monde, comme autant de métastases d’une catastrophe en cours : « Tombouctou titube. Borno implose. Kaduna se tortille d’attrition. Mogadiscio pleut des obus à fragmentation », énumère-t-il, évoquant aussi Christchurch, en Nouvelle-Zélande : « Le crime a commencé voilà une éternité, il se distend jusque dans l’imprévisible. »
Bien plus, ‘’Ode humaniste pour Chibok, pour Leah’’ est une interpellation de tout être humain de prendre sa part de responsabilité dans les mutations et les déchirures que vit le monde. Le nouveau livre de Wole Soyinka, traduit de l’anglais par Christiane Fioupou, éd. Présence africaine, comprend 70 pages et coûte 10 euros. Soit 6550 FCFA.
Par C. Kipré