Décédé le 9 avril à 99 ans, le duc d’Édimbourg semble indissociable de la figure d’Élisabeth II. Par son destin et son esprit, il est pourtant l’une des personnalités les plus remarquables du siècle écoulé. Hommage !
Seuls les murs de Buckingham Palace pourraient en témoigner. On raconte que, dans la plus stricte intimité, le prince Philip surnommait son épouse « ma petite saucisse », ou alors « mon chou ». L’anecdote paraît tellement cocasse qu’elle est difficile à imaginer. Car son épouse, c’était la reine, l’une des femmes les plus célèbres et respectées au monde. Si Élisabeth II, bientôt 70 ans de règne, semble toujours immortelle, son Philip, lui, vient de partir, le 9 avril 2021 à l’âge de 99 ans, après quelques années de retraite et de mauvaise santé.
Philip était tout ce qu’Élisabeth II n’est pas : piquant, caustique, gaffeur, maladroit… Le duc d’Édimbourg n’avait jamais sa langue dans sa poche, au détriment parfois de la courtoisie ou du politiquement correct. Comme en 1992, lors d’une visite diplomatique en Australie, alors qu’on lui proposait de caresser un koala, emblème national, il s’était exclamé : « Oh non ! Je pourrais attraper une maladie épouvantable ! » Mais ses dérapages, les Anglais lui pardonnaient. Il était également connu pour son caractère volcanique. C’est lui qui n’a jamais pardonné à Lady Diana qu’elle lave son linge sale en public, alors qu’il l’avait toujours défendue face au prince Charles. C’est également lui qui a mis Sarah Ferguson, l’épouse du prince Andrew, à la porte du château de Balmoral, après qu’elle se soit affichée dans des tabloïds avec l’un de ses amants.

Si l’on célèbre souvent la longévité d’Élisabeth II, jamais on ne l’a fait avec celle de Philip. Pourtant, il a été celui qui a occupé le plus longtemps le rôle de prince consort du Royaume-Uni. Consort… Un terme qu’il n’aimait pas vraiment. Un poste de second plan qu’il a difficilement accepté, lui qui aurait rêvé d’être roi plutôt que de devoir toujours marcher deux pas derrière son épouse, comme le protocole lui imposait. Même s’il aurait voulu défier les règles, Philip se devait de les appliquer. Par respect pour Sa Majesté, dont il était le premier serviteur depuis le couronnement de juin 1953.
Leur première rencontre avait eu lieu à la base navale de Dartmouth en juillet 1939. Elle avait 13 ans, lui 18. Élisabeth était immédiatement tombée amoureuse de ce lointain cousin aux origines aussi éclectiques que mélangées. Né prince de Grèce et de Danemark, à Corfou, il n’avait malheureusement aucun trône et avait passé son enfance ballotté aux quatre coins de l’Europe, chez différents parents, étudiant aussi bien en Allemagne qu’en Angleterre, ou encore en Écosse. Son père était le frère du roi Constantin des Hellènes, mais mourut très tôt pendant un exil à Monte-Carlo. Sa mère était une nièce de la dernière impératrice de Russie, et termina ses jours dans un couvent à Athènes. Entre la jeune Élisabeth et le beau Philip – à la silhouette élancée –, les correspondances puis les sentiments se nouèrent rapidement. Les fiançailles furent dont actées, à condition que le prince adopte la nationalité britannique et abandonne son nom à consonance germanique, et le mariage célébré le 20 novembre 1947. Le matin-même, Philip Mountbatten était fait duc d’Édimbourg, comte de Merioneth et baron de Greenwich par le roi George VI. La pluie londonienne n’avait pas découragé les milliers d’Anglais amassés devant Westminster. Bien avant le mariage de William, ou encore celui d’Harry, 200 millions de téléspectateurs dans le monde avaient regardé la future reine d’Angleterre épouser ce prince plus que charmant.

On connaît l’expression : derrière chaque grand homme, il y a une femme… Derrière Élisabeth II, il y avait un homme. Certes, Philip l’a certainement fait souffrir : on connaît les nombreux adultères qu’on lui a prêtés. Mais quel couple ne connaît pas de bas en 74 années de mariage ? Malgré tout, il a toujours été son roc, son point de repère. Celui qui l’a aidée à traverser toutes les crises. Elles ont été nombreuses depuis 1947 : les frasques de la princesse Margaret, l’annus horribilis, la mort de Diana et plus récemment le « Megxit »… Mais aussi la crise du canal de Suez, l’affaire Profumo ou encore le Brexit.
Ces dernières années, il avait pris officiellement sa retraite et s’était retiré dans un petit cottage sur les terres de Sandringham, passant ses journées à lire et à peindre. Loin de Buckingham, de la cour mais aussi de la reine, le prince Philip n’en restait pas moins le « premier homme » du Royaume-Uni.
Par vanityfair.fr