Depuis quelques jours, Mme Anne Lemaistre, la représentante pays du Bureau Abidjan de l’Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO), fait ses adieux à la capitale économique ivoirienne. Ainsi, la Cheffe de la mission onusienne, a-t-elle entrepris des visites d’au revoir aux hommes et femmes des structures avec lesquelles elle a collaboré pendant trois ans. Parmi celles-ci, il y a la maison de mode Momo Che couture située à la Riviera 2 dans la commune de Cocody.
Accompagné de Mame Omar Diop, son successeur Bureau Unesco d’Abidjan, Mme Anne Lemaistre s’est rendue à l’atelier de couture de Momo Che le 25 avril dernier. A côté de ses adieux à la maison de couture et à sa patronne, Anne Lemaistre était surtout là pour jeter un coup d’œil sur la formation de 30 filles confiée à Momo Che Couture. « Nous avons organisé une formation pour ces jeunes filles vulnérables. Car nous mettions en œuvre un projet qui était financé par le fonds de la consolidation de la paix contre les discours de haine. Nous avons mené des actions très variées dans ce cadre sur les réseaux sociaux. Mais nous nous sommes aperçus que dans les quartiers, il y avait des jeunes gens vulnérables. Que ce soit des garçons ou de jeunes filles, ils étaient des facteurs d’insécurité sociale dans leurs propres communautés. Alors nous avons décidé de les sélectionner et de pouvoir leur offrir une formation d’une part, en décoration et d’autre part une formation en stylisme et en couture de manière à ce qu’elles puissent développer une activité génératrice de revenus », a situé la fonctionnaire onusienne, avant de montrer sa joie à la fin de la formation : « Je trouve que ces jeunes filles ont dépassé nos attentes. Cette formation contribue à leur intégration dans la société mais c’est aussi pour elles, un pied à l’étrier pour pouvoir démarrer un nouveau métier que j’espère qu’elles embrasseront pour le reste de leur vie ».
La formation a rassemblé au total 27 jeunes filles dont 20 venues par l’Unesco. Elles se sont pleinement impliquées dans cette formation intensive de sept mois, qui demandait énormément d’investissement personnel. Avant de livrer les conclusions de la formation à l’Unesco, on peut déjà affirmer que ces filles ont passé l’examen de passage avec succès. « Le gage sur lequel Momo Che et moi pouvons affirmer que c’était un succès pour elles, c’est qu’elles se sont vues impliquer dans différents défilés notamment celui du Masa 2022. Nous avons vu leur production sur un podium. Certaines ont également été embauchées par d’autres stylistes. C’est nous un bon départ dans la vie, un bon départ professionnel. L’objectif est atteint », a salué Mme Anne Lemaistre.
L’essentiel du boulot a été abattu par Momo Che et son équipe. La plupart des ‘’impétrantes’’ n’avaient aucune notion de la couture. Il a donc fallu reprendre tout le b.a.-ba pour aboutir à un bon résultat au bout de sept mois. « Je me suis investie réellement. J’ai même pris une année sabbatique pour pouvoir relever ce défi. Il faut dire que c’était un challenge pour moi. Mais c’était intéressant et amusant dans la mesure où j’aime transmettre. Pour vous dire vrai, la transmission, c’est mon hobby. J’ai été aidée par le fait que les filles avaient l’amour du métier. Elles étaient à l’écoute, vraiment dévouées…», a souligné la formatrice.
Choisie par l’Unesco pour assurer cette transmission de savoir, Momo Che s’est dit très honorée. « Je suis très contente d’avoir été choisie par l’Unesco qui a vraiment mis tout en œuvre pour que ces fille-là sortent de la vulnérabilité », dit-elle. Là, ça y est, c’est fait. Avoir tendu la perche à ces filles, est un objectif psychologique à atteindre à leur niveau. « J’espère que le projet sera reconduit pour d’autres filles qui sont vraiment dans le besoin. L’Unesco fait beaucoup pour la formation, l’éducation… Je vous remercie pour cette belle opportunité que vous m’avez donnée », a encore souligné la créatrice.
Parmi ces heureuses filles à se former chez Momo Che Couture, il y a Djénéba Ouattara. Avec un niveau scolaire de cours élémentaire et un mariage précoce ponctué de deux enfants, dame Djénéba étaient dans les difficultés malgré son petit commerce de beurre de karité et soumbara. « Depuis que j’ai été retenue pour participer à la formation, j’ai donné le meilleur de moi. En tout cas, j‘ai donné ce que j’avais comme connaissances et capacités. J’attendais d’être à côté de quelqu’un qui pouvait me donner plus de détails, de connaissances, d’amour de ce que je veux faire. Et Dieu a fait que je suis arrivée au bon endroit et je ne me plains pas. J’ai été éduquée mentalement, physiquement et spirituellement. On s’est formée sur tous les plans. Pas seulement pour la couture. Il y a eu l’organisation, la propreté, le rangement… Personnellement, j’ai reçu plein de choses que je n’avais pas eues chez mes parents. Je suis fière d’être une enfant qui va appartenir désormais à l’Unesco », reconnait Djénéba Ouattara. Elle souhaite continuer chez Momo afin de parfaire son talent. « Mes rêves ne sont pas encore finis. Parce que quand tu rêves, il faut toujours rêver grand. Je continue encore chez Momo Che pour perfectionner mon talent. Je ne peux pas dire que ma vie a été facile. Mais aujourd’hui, je sais que ce n’est plus dur. Ou ce ne sera plus dur. Le dur est derrière moi. Je suis devenue mature, une femme d’affaires », soutient-elle.
L’initiative de l’Unesco et de Momo Che a aussi été bénéfique pour Marie Charlène. Enceinte pendant son année de BTS, elle n’a pas pu avoir un stage pour valider son diplôme. « Pendant la période où j’étais à la maison, j’ai appris le lancement des activités de l’Unesco. Je vendais des sandwiches devant notre cours. Au départ, on a parlé de pâtisserie, décoration et couture. Et quand je suis arrivée, on m’a fait savoir qu’il ne restait que la couture et la décoration. Et comme depuis toujours, j’aime la couture, alors j’y suis allée sans hésiter. Les femmes qui m’ont reçue, m’ont attentivement écoutée et après j’ai été sélectionnée. A part l’aiguille et les poupées, je n’avais aucune notion de la couture. Aujourd’hui, grâce à maman Momo Che, j’ai pu faire beaucoup de progrès. Je peux dire que je suis complète aujourd’hui », déclare Marie Charlène. Elle a désormais une petite machine à la maison et confectionne des habits de petites filles. « Je suis à Divo où je couds mais il me manque les moyens pour m’installer et faire de grandes choses. J’espère que l’Unesco va entendre mon cri de cœur », s’est-elle adressée à l’organisme onusien.
Mme Anna Lemaistre a aussi profité de sa visite pour présenter le nouveau représentant pays du Bureau Unesco d’Abidjan. Il s’agit de M. Mame Omar Diop qui va assurer la suite de mission en terre ivoiriennes. Quant aux filles formées, elles ont présenté leurs travaux à la délégation avant leur sortie officielle.
Par Omar